Cannabis Médical : Casser la loi pour sauver des vies

Dans la plupart des pays, l'utilisation du chanvre est interdite même dans un but médical. L'automédication au cannabis a poussé un grand nombre de citoyens généralement respectueux des lois à entrer en conflit avec le système légal.

Savages : Lutte entre hippies et cartels

Dans Savages, le cinéaste américain Oliver Stone met en scène le combat implacable mais encore «hypothétique» entre des néo-hippies californiens et un cartel de la drogue mexicain cherchant à s’implanter de l’autre côté de la frontière.

INTERVIEW DE JORGE CERVANTES, LE GOUROU MONDIAL DU CANNABIS

Soft Secrets interview Jorge Cervantes, un des grands experts mondiaux du cannabis et collaborateur de Soft Secrets.

Cannabis : les bons plants du Colorado

Depuis 2000, cet Etat américain a légalisé l'usage médical du cannabis. De la culture des fleurs au commerce des produits dérivés, les business se multiplient. Une économie très profitable, y compris pour les finances locales.

La France accro à la prohibition

Publication en juin dernier à New York du rapport de la Commission mondiale sur la politique des drogues (Global Commission on Drug Policy) signé par une kyrielle de personnalités de stature mondiale qui constatent l'échec de la guerre à la drogue...

Politique antidrogues : à l'Est, du nouveau !

Depuis le 1er juillet, la Pologne préside l'Europe avec une réputation ultraconservatrice sur les questions de société. Pourtant ses dirigeants viennent d'assouplir la répression contre les usagers de drogues, démontrant ainsi que ce débat y est plus ouvert et moins politiquement clivé qu'en France.

Depuis dix ans, la Pologne leur a appliqué la législation la plus répressive de l'UE. Son impact social et sanitaire a été très négatif.

Sous la pression de militants de la société civile, avec 80 000 partisans sur Facebook, le soutien du principal quotidien et de nombreuses personnalités de tous horizons, le Parlement (de droite) et le Président (centre-droit) ont promulgué un amendement établissant une plus grande distinction pénale entre les usagers et les dealers. La Pologne a ainsi fait le premier pas vers une politique pragmatique fondée sur des données scientifiques et non plus sur des peurs irrationnelles.

Les réformateurs devront encore plaider pour convaincre l'opinion et les décideurs polonais de reproduire l'expérience tchèque, le système le plus réaliste à l'égard de l'usage de stupéfiants. Le pays devra aussi résister aux pressions prévisibles du duo franco-russe qui depuis le G8 de Deauville semble remplacer les Américains à la tête de la guerre à la drogue.

Du désir de liberté à la peur généralisée

Sous le communisme, la Pologne avait une des lois les plus progressistes d'Europe. Par exemple l'usager dépendant n'était pas poursuivi.

Après la chute du Mur, toutes les valeurs de l'ancien régime ont été contestées. À partir de 1997, cette vague conservatrice s'est accentuée jusqu'au passage de 2000 à 2001 de Lech Kaczynski au ministère de la Justice.

Pour cette élection, puis pendant sa conquête et son exercice du pouvoir, jusqu'à aujourd'hui avec son parti populiste Droit et Justice, le pouvoir a utilisé les usagers de drogues pour faire peur aux électeurs et revendiquer une politique sécuritaire très répressive.

Dans l'ancienne version de la loi adoptée sous son ministère, la détention de stupéfiant, quel que soit la quantité et le produit, entraînait automatiquement une inculpation pénale avec une peine maximum de trois ans d'emprisonnement. La Pologne a donc longuement testé la tolérance zéro. Sans succès notable.

Pas l'impact escompté sur le trafic

La police avait fortement soutenu cette stratégie, affirmant qu'elle allait faciliter la répression du trafic. Depuis son adoption, les procédures pour détention de petites quantités ont augmenté de 1 500 % et les procédures pour trafic ont diminué de 50%.

Les fonctionnaires de police sont évalués et donc promus selon leurs résultats chiffrés. Il est bien plus rentable d'organiser la chasse aux fumeurs de joint que de démanteler des réseaux mafieux. On fait ainsi grimper le taux d'élucidation sans s'attaquer à la vraie criminalité.

En France, la Cour des comptes vient de dénoncer ce type de mystification dans son évaluation de la politique sécuritaire.

Pour une première infraction ou une dose minime, la peine prononcée est généralement assortie d'un sursis et d'un casier judiciaire criminel de cinq ans aux conséquences à long terme injustement discriminantes. Il devient très difficile de voyager, d'étudier ou d'immigrer, notamment aux Etats-Unis, ainsi que d'occuper un poste dans la fonction publique.

Une punition disproportionnée

Ce marquage constitue aussi un gros handicap pour un emploi dans le secteur privé. Abusivement appliquée à cette période décisive de l'existence, cette loi a gravement compromis l'avenir d'une partie de la jeunesse polonaise. Elle a souvent entraîné une marginalisation durable au prétexte de réprimer la possession de cannabis.

Les usagers dépendants ont été encore plus durement affectés, la fréquentation quotidienne des dealers augmente considérablement leur probabilité d'interpellation. En cas de récidive, les peines s'additionnent et deviennent automatiquement exécutoires.

Le système judiciaire polonais est très lent, pas totalement informatisé. Avec l'ancienne loi, les condamnations pour quelques doses s'accumulaient et de nombreux usagers étaient rattrapés par de longues peines alors qu'ils n'étaient plus dépendants et en voie de réinsertion. De plus, l'inscription dans un traitement comportait le risque d'être repéré et incarcéré. Cet effet très dissuasif rendait impossible le traitement efficace de l'addiction.

La dépénalisation s'invite dans le débat

Le nouvel amendement permet aux procureurs de suspendre les poursuites pénales dans trois cas :

  • saisie d'une petite quantité ;
  • première infraction ;
  • usager dépendant.

L'étape suivante consiste à s'assurer que cette opportunité soit massivement saisie par les tribunaux. En France par exemple, la circulaire Pelletier de 1978 fut conçue par le gouvernement dans le même esprit et jamais vraiment appliquée.

Les réformateurs plaident maintenant pour une dépénalisation systématique dans ces trois cas et pour porter les limites de la possession publique et de l'autoproduction des différentes substances jusqu'aux quantités très réalistesadmises depuis plus d'un an en République tchèque. Ils s'appuient fortement sur le rapport de la Global Commission on Drug Policy qui préconise l'expérimentation de toutes les politiques de régulation légale des drogues.

Dans le débat français enfin réanimé ces derniers mois, le rapport de la commission d'enquête parlementaire sur la toxicomanie, les déclarations du gouvernement et des principaux prohibitionnistes, l'argumentaire de la Mission interministérielle pour la lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) prônent un renforcement de la répression des usagers et la poursuite de la guerre à la drogue.

Ils affirment aussi que les réformes engagées dans d'autres pays, y compris les plus libéraux, vont toutes dans ce sens. C'est très contestable pour les Pays-Bas et totalement faux pour la Pologne et la République tchèque. Ces pays démontrent qu'une autre politique des drogues est possible.

Laurent Appel, journaliste à Asud (Autosupport des usagers de drogues) ; Kasia Malinowska-Sempruch, directrice du programme mondial pour la politique des drogues (fondation Open Society).

Par Laurent Appel

[Source:RUE89]

«LA DROGUE TUE, MAIS LA RÉPRESSION TUE AUSSI»

Elle s’est beaucoup battue pour la santé. Aujourd’hui, l’ancienne conseillère fédérale Ruth Dreifuss dénonce la «guerre contre la drogue». Une politique qui ne ferait qu’aggraver les ravages commis par les narcotrafiquants.

Cinquante ans de guerre pour rien. C’est le constat édifiant que vient de lancer la Commission mondiale sur la politique de la drogue. Un groupe qui réunit 19 personnalités, et pas des moindres. Ruth Dreifuss, Kofi Annan, l’ancienne procureure du TPI Louise Arbour ou encore les anciens présidents mexicain, brésilien et colombien se sont associés dans un combat. Tous arrivent à la même conclusion: des milliards ont été dépensés pour lutter contre le trafic de drogue. Et non seulement le nombre de trafiquants et de consommateurs a augmenté, mais les ravages en termes de santé publique explosent. Cette politique de répression est désormais dénoncée.

Vous le dites sans nuances: toute la politique mondiale de lutte contre la drogue est un échec. Ce n’est pas un peu catégorique comme constat?
Non. On peut vraiment parler d’un échec. Sur toute la ligne. Cela fait quarante ans que Nixon a lancé sa «guerre contre la drogue». Et cinquante ans que la convention de l’ONU sur les drogues a été ratifiée. Si, au départ, il y avait une volonté d’équilibre entre répression et santé publique, on constate aujourd’hui que c’est la répression qui a dominé. Or, la consommation n’a cessé d’augmenter (en dix ans, celle d’opiacés a augmenté de 34,5% et celle de cocaïne de 27%). Idem pour la petite criminalité. Et pareil encore pour le crime organisé. Sans parler des effets dévastateurs de la répression en termes de santé publique, et c’est cela qui nous alarme avant tout.

C’est vrai, les chiffres sont inquiétants. Mais comment les expliquer? Les narcotrafiquants sont-ils plus forts que tous les gouvernements réunis?
La prohibition provoque la clandestinité, ce qui rend la prévention et les soins difficiles. Mais cela crée aussi des conditions économiques idéales pour les criminels. Ils ont un pactole énorme à se faire, sans aucune concurrence légale; alors, croyez-moi, ils ne lésinent pas sur les moyens. C’est simple, nous vivons le même phénomène que ce qui s’est passé lors de la prohibition aux Etats-Unis. A ce moment-là, le pouvoir de la mafia a explosé. La violence a augmenté… et aussi la consommation d’alcool! Sans parler des produits écoulés illégalement, qui étaient souvent très dangereux pour la santé. La drogue tue, mais la répression tue aussi.

Et pourquoi a-t-il fallu attendre votre rapport pour que cet échec soit constaté?
Politiquement, il est difficile d’admettre un échec. Ce sont les Etats-Unis qui tiennent le plus fermement à cette politique de lutte contre la drogue et qui investissent des milliards pour une bataille perdue. Et qui, du coup, deviennent aussi responsables d’effets dévastateurs. Prenez les désherbants, dont ils arrosent la Colombie par hélicoptère, lésant ainsi de nombreux paysans, y compris ceux qui ne cultivent pas la coca.

Les Etats-Unis, justement. Comment ont-ils réagi à ce rapport?
Lorsque nous l’avons présenté à New York en juin, ils nous ont très vite fait savoir qu’ils ne partageaient pas nos conclusions…

Vous critiquez aussi de manière assez frontale la politique de l’ONU…
On peut le dire ainsi. Nous avons l’impression que sa politique n’est pas cohérente. La priorité est donnée de manière trop importante à la répression.

Constater l’échec, c’est une chose. Mais que proposez-vous pour résoudre la question?
Nous voulons créer des conditions pour un débat ouvert. Cela permettrait de dégager des solutions plus efficaces que cette «guerre contre la drogue», qui a échoué. Nous devons trouver des solutions autres que la prohibition.

En légalisant?
Il y a toutes sortes de pistes à explorer. En dépénalisant, comme c’est le cas au Portugal, où le consommateur n’est plus puni pour certaines quantités. Il peut avoir une simple amende et est engagé sans contrainte à se soigner s’il est devenu dépendant. Aucune hausse de la consommation n’a été constatée.

Au contraire, les Pays-Bas sont en train de restreindre l’accès aux coffee shops…
Les Pays-Bas ont surtout décidé de restreindre les coffee shops aux touristes. Quant aux habitants, ils n’ont pas une consommation plus élevée que dans les pays répressifs. Mais il faut insister sur le fait que la politique néerlandaise est une demi-mesure. La vente est contrôlée, mais l’approvisionnement reste clandestin.

Il provient de cultures illégales?
A ce que je sais, oui.

Reprenons l’exemple du Portugal: ne pas pénaliser les consommateurs ne résout pas pour autant la question des narcotrafiquants.
Dépénaliser permet déjà de sortir le consommateur de la clandestinité, donc d’offrir de meilleures possibilités d’encadrement. Regardez aux Etats-Unis, où la moitié de la population carcérale a été condamnée pour des faits liés à la drogue, dont beaucoup de consommateurs. Lorsqu’on voit ce que dépense ce pays pour un système carcéral dont l’efficacité est tellement faible…

On en revient donc à la question de l’Etat dealer…
Doit-on proposer un monopole public, comme pour l’alcool dans les pays scandinaves? C’est aussi une substance dangereuse, qui peut générer des problèmes de santé publique et de sécurité. Or, aujourd’hui, on arrive mieux à la cadrer. En Suisse, j’avais proposé qu’une production de cannabis locale et un commerce limité soient tolérés, avec le couperet de la loi au cas où les conditions ne seraient pas respectées, comme la protection des jeunes ou un taux maximum de substance active. Mais le Conseil national n’avait pas voulu de ce projet du Conseil fédéral, contrairement au Conseil des Etats.

Mais un ado qui veut s’acheter de la vodka arrive à ses fins. Ne craignez-vous pas qu’une dépénalisation facilite l’accès aux drogues?
Aujourd’hui, on est déjà dans le pire cas de figure. Tout est accessible. Et les trafiquants font tout pour obtenir de nouveaux clients. Sans parler de ces innombrables nouvelles drogues de synthèse, dont on ne sait pas grand-chose.

Et que répondez-vous aux parents, qui voient dans la répression un rempart pour protéger leurs enfants?
On ne peut pas éviter la tentation. Mais on peut aider à forger le caractère, à informer des dangers. Je préfère que les gens apprennent à vivre avec ce monde et ses tentations. Et je pense qu’une société sans drogue est une illusion; cela n’a jamais existé. Mais, attention, je ne suis pas en train de faire l’apologie du cannabis. Je n’en ai jamais consommé et déconseille fortement à quiconque de le faire.

Et vous avez l’espoir que la politique évolue dans votre sens?
Certainement. Le tabou se brise. Regardez ce qui se passe en France ces jours, quand bien même elle applique un modèle répressif. Le maire de Paris, Bertrand Delanoë, vient de demander un débat sans tabou sur les locaux d’injection. Même aux Etats-Unis, Washington a lâché du lest sur l’usage thérapeutique du cannabis.

Concrètement, que va-t-il se passer? Ce rapport est-il condamné à moisir dans un placard?
Nous avons rencontré beaucoup d’intérêt, plus que ce que nous attendions, de la part de ministres, de chefs de gouvernement. Et nous allons continuer à animer le débat en faisant connaître les solutions en matière de santé publique, en informant des violations de droits humains qui résultent de cette «guerre contre la drogue».

Et vous, madame Dreifuss, qu’est-ce qui vous a motivée à vous engager au sein de cette commission?
J’ai consacré dix ans de ma vie aux questions de santé publique. Et la drogue et le sida sont deux domaines dans lesquels j’ai le sentiment d’avoir contribué à sauver des vies. C’est un sentiment rare en politique. Et précieux. C’est quelque chose qui vous marque et vous oblige à continuer.

Par Muriel Jarp - Mis en ligne le 26.07.2011

[Source:L'illustre]

Journalisme: peut-on fumer un joint pour obtenir une info?

C’est un intéressant cas d’école, appuyé sur une histoire vraie, qu’a exposé dimanche dans le Washington Post le chroniqueur sarcastique Gene Weingarten. Avec cette question en toile de fond: un journaliste peut-il accepter un joint, et donc commettre un délit, s’il pense que cela lui permettra d’avoir une info importante?

Les faits, tels que Weingarten les relate, sont les suivants. Un journaliste du Washington Post (en fait Weingarten lui-même, en 2004, comme il l’admet dans les commentaires de son article) est envoyé trois jours dans une ville du Midwest pour enquêter sur un homme ordinaire, appelé « Bob », pris dans une affaire d’importance nationale. Au second jour, les choses n’avancent pas:

Le journaliste « sent que Bob ne lui fait pas assez confiance pour se confier. Le problème, selon le journaliste, est culturel. Bob et lui sont d’origine très différentes, avec des niveaux différents d’éducation et de sophistication ».

Le troisième jour, Bob invite le journaliste à un barbecue avec des amis. Et sort une pipe de marijuana. Il fume puis la tend à notre sympathique journaliste. Lui-même ancien fumeur, ce dernier sait qu’il pourrait fumer et continuer à travailler sans problème. Personnellement, il ne voit rien d’immoral à fumer du cannabis. Seulement voilà, le Washington Post a une règle intangible: un reporter en mission ne doit en aucun cas enfreindre la loi, sous peine de renvoi. D’un autre côté, le reporter « sent que s’il refuse la pipe, il perd sa dernière chance d’établir la confiance qu’il espère »

Et Gene Weingarten de proposer à ses lecteurs un petit sondage avec six attitudes possibles:

Il doit refuser et suivre les règles de son employeur en toutes circonstances, la loi c’est la loi

Il doit refuser parce qu’il ne sera plus en état de travailler après

Il doit refuser parce que ce serait mentir à sa source que de fumer uniquement pour le mettre en confiance

Il doit refuser parce que ça donnerait à la source un moyen de chantage à l’avenir, s’il n’aimait pas l’article par exemple

Il doit refuser pour l’ensemble de ces raisons

Il doit accepter car ce n’est qu’une entorse mineure et que son but est de ramener l’histoire. De deux maux, il doit choisir le moindre.

Bien sûr le questionnement éthique de l’auteur et sa moralité sont tout à son honneur. Et il n’est pas inintéressant en tant que journaliste de s’arrêter sur ce genre de dilemmes: peut-on se faire passer pour un autre pour obtenir une info que l’on aurait pas sans cela? Peut-on filmer quelqu’un à son insu pour apporter la preuve de ce que l’on cherche à démontrer? Peut-on utiliser une information obtenue dans un cadre strictement privé?…

Confronté à ce genre de situations, chacun d’entre nous se détermine au gré des situations, des enjeux et de l’importance de l’entorse comparée à l’importance de l’information que l’on espère en retirer. Même si, officiellement, la charte de devoirs professionnels des journalistesapporte une réponse précise (mais toute théorique) à quasi toutes ces situations pour rester un journaliste « digne de ce nom ». Mais pour être honnête, peu de journalistes en connaissent réellement le contenu et les débats se référant à la charte sont l’exception dans les rédactions. Reste donc le libre-arbitre de chacun de nous en essayant au mieux de concilier théorie et pratique. Ainsi, au moins deux autres portes de sortie possibles me sont apparues à la lecture de cet article.

D’abord, de créer la confiance en parlant d’un consommation passée de cannabis, d’anecdotes en tous genres dont raffolent la plupart des fumeurs… mais de prétendre que pour des raisons de santé, tout cela n’est plus qu’un souvenir. C’est certes mentir, mais ce n’est pas agir illégalement tout en se donnant une chance d’obtenir l’info…

L’autre solution présente l’avantage d’être très américaine, et même « présidentielle ». C’est la solution « à la Bill Clinton ». En prenant la pipe pour faire semblant de fumer, mais sans avaler la fumée, le journaliste ne commet aucun crime (il n’a pas fumé) mais rassure son interlocuteur… Le candidat à la Maison Blanche Bill Clinton était finalement un peu confronté à la même situation lorsqu’en 1992 il prétendit avoir fumé, mais ne pas avoir avalé la fumée: s’assurer la sympathie des libéraux, ne pas (trop) mentir et ne pas avouer avoir fait quelque chose de contraire à la loi.

Quoi qu’il en soit, les lecteurs du Washington Post,eux, ont tranché: 52% estiment qu’il devait fumer pour établir un lien de confiance. Seuls 10% ont estimé qu’il ne devait pas fumer parce qu’il n’y a pas d’entorse mineure à la loi. Assez rassurant finalement.

Arnaud Aubron

[Source:Les inrock]

Vienne, cannabis et légalisation : dans les faits c’est déjà fait

Vienne compte un « Headshop » pour 100 000 habitants. De quoi combler parfaitement les amateurs de cannabis. D’autant plus que ces surfaces commerciales ont pignon sur rue et fonctionnent en toute légalité. La consommation de majijuna semble aujourd’hui rentrée dans les moeurs. Pour assurer un meilleur contrôle de la qualité et mettre un terme aux activités des trafiquants, les différentes personnes que nous avons rencontrées plaident pour une légalisation totale du cannabis.

Seize minutes, top chrono, pas une de plus! A peine débarqué à l’aéroport de Vienne, leCity Airport Train (CAT) vous dépose en plein centre-ville sans la moindre difficulté. Avec autant de facilité, et tout aussi rapidement, tout touriste fréquentant laMariahilfer Strasse, soit la plus grande artère commerciale viennoise, tombera nez-à-nez et sans la moindre arrière-pensée, sur le « City Grow ». A l’intérieur de cette surface commerciale de 400m2, vous pénétrez, au cœur même de la capitale autrichienne, dans le plus grand magasin où pousse du cannabis. Impressionnant. Mais une toute autre surprise de taille nous attend dans le sud de la périphérie de viennoise. Avec ses 2000m2, le gigantesque entrepôt « Grow City » se présente, en toute légalité, comme le plus grand « Grow Center » du continent européen.!

« Le simple fait de posséder des plantes à votre domicile n’a rien d’illégal. Si vous pouvez prouver au juge que vous possédez ces plantes, sans avoir l’intention de lesfumer, vous ne serez pas inquiétés. »

Le décor est désormais planté. Bienvenue dans les locaux de la société Bushplanet. Établi à Vienne depuis 1997, cette entreprise propose à ses clients, depuis 14 ans déjà, la parfaite panoplie de l’amateur de cannabis. Homebox, composants électriques, ampoules hautes et bassesconsommations, réflecteurs, contrôleurs et systèmes d’éclairage, films réfléchissants, ventilateurs, filtres à charbon actif, silencieux, neutralisateurs d’odeur, humidificateurs, serres, pots, systèmes d’irrigation, accessoires de jardinage, rogneuses, terreau, nutriments, additifs, engrais, le tout compilé dans un catalogue de 55 pages. Du matériel dernier cri, certes, mais pas dedrogue. Que l’on ne s’y trompe pas, Vienne ne s’est soudainement pas transformé en « Nouvelle Amsterdam ». Ne confondons pas les fameux coffee shop néerlandais et les Head & Growshop autrichiens. Chez Bushplanet, vous trouverez tout l’attirail nécessaire et des plantes de cannabis, mais surtout pas de fleurs et c’est assurément là toute la subtilité. « En Autriche, si vous avez l’intention de produire de la drogue, c’est tout à fait illégal », nous affirme d’emblée un des employés. « Mais, si vous êtes en possession d’une centaine de plantes à votre domicile et que vous êtes en mesure d’expliquer pourquoi, tout sera en ordre. Trouver la bonne justification, en règle avec les lois autrichiennes, ne sera pas forcément évident, mais le simple fait de posséder des plantes à votre domicile n’a rien d’illégal. Si vous pouvez prouver au juge que vous possédez ces plantes, sans avoir l’intention de les fumer, vous ne serez pas inquiétés. »

Pour une pleine légalisation du cannabis

A Vienne, une vingtaine de magasins de ce type existent aux quatre coins de la ville. Dans cette capitale de 2 millions d’habitants, le marché est même en voie de saturation. « Si vous débutez votre business aujourd’hui, poursuit notre interlocuteur, il est indispensable de faire preuve de créativité. Pour se différencier, il faut faire des efforts conséquents et être courageux. Monter ce genre d’affaire n’est pas à la portée du premier venu. » Qu’en est-il des relations entretenues avec les forces de l’ordre ? « Au début, la police s’est posée de nombreuses questions: contrôles fréquents, destructions de plants, affaires portées en justice, ce n’était vraiment pas évident. A présent, nous collaborons d’une manière plus efficace. Ils ont compris que nos activités ne sont pas illégales et nous leur avons prouvez que nous sommes une société responsable. Prenons l’exemple de la « Spice », un cannabis synthétique. Il y a quelques années, nous avons refusé de vendre ce produit dans nos magasins et de nombreux clients n’ont pas compris notre démarche, mais l’avenir nous a finalement donné raison car aujourd’hui, ce produit est devenu illégal. Nous ne sommes pas là uniquement pour nous faire de l’argent, il y a une vraie réflexion derrière nos activités. Nos affaires continueront à prospérer tant que nous n’exagérerons pas. » Considérons à présent que les Viennois disposent à portée de main de tout l’équipement nécessaire pour faire pousser des plants de cannabis.

« On reçoit très fréquemment des business men. Nos clients ne sont pas des dealers, mais de simples consommateurs qui fabriquent et contrôlent leur propre consommation. »

Deux questions nous viennent désormais à l’esprit. Est-il aisé de trouver du cannabis en pleine rue ? Et peut-on dresser facilement un profil type du consommateur de majijuna ? La réponse à cette dernière question fuse sans tarder. « Depuis que je travaille chez Bushplanet, je peux vous assurer qu’il est encore plus compliqué pour moi de dessiner le portrait robot du consommateur type de cannabis », nous avoue, en esquissant un léger sourire, un autre vendeur d’une vingtaine d’année. « A notre plus grand étonnement, nous avons récemment reçu trois grand-mères qui souhaitaient faire pousser du cannabis dans leur jardin et sur leur balcon. Elles étaient très intéressées par nos produits et elles n’ont jamais donné l’impression qu’elles venaient faire leurs emplettes en lieu et place de leurs petits-enfants. Peut-être ont-elles fait partie de la mouvance hippie dans les années soixante ? Je n’en sais rien, mais pourquoi pas ? On reçoit très fréquemment des business men. Nos clients ne sont pas des dealers, mais de simples consommateurs qui fabriquent et contrôlent leur propre consommation. »

Les Grow Center offrent tout le matériel nécessaire à l'exploitation du cannabisLes Grow Center offrent tout le matériel nécessaire à l’exploitation du cannabis | Mais la drogue en tant que telle est interdite à la venteEt nos différents interlocuteurs de plaider pour conclure d’une même voix et sans surprise pour une pleine légalisation du cannabis. Pour dans un premier temps tendre à nouveau vers un peu plus de liberté, sans pour autant craindre une augmentation de la consommation qui, selon eux, finirait bien par se stabiliser au fil du temps, pour ensuite avoir la possibilité de contrôler légalement la qualité de la marijuana en circulation, mais surtout, pour mettre définitivement un terme à tout le trafic qui tourne autour du cannabis. « La situation actuelle permet à un petit groupe de personnes ou de sociétés de s’enrichir », affirment les différentes personnes interviewées. « Autant pour les forces de l’ordre que pour les trafiquants, une autorisation totale du cannabis engendrerait des pertes financières conséquentes. Voilà pourquoi malheureusement, on n’imagine pas les règles autrichiennes, voire même européennes, évoluer lors des prochaines années. »

Photos : San Diego Shooter/flickr Texte : © Frédéric Lambert

[Source:CaféLabel]

Intervention choquante..


"Je suis retraité sans états d’âme quand il s’agit d’approuver l’action des forces de l’ordre contre la délinquance ! Mais l’intervention de la gendarmerie sur la plage de Boucan, mercredi 20 vers 11H30 m’a choqué.

"Un jeune homme, tranquille et pacifique, portait un tee shirt avec feuille de cannabis, et mention cé organic, (pas de quoi fouetter un chat). Les gendarmes lui ont demandé de quitter la plage en s’appuyant sur l’interdiction de représentation du cannabis. Pour s’assurer du départ du « délinquant » ils l’ont suivi avec le véhicule de gendarmerie jusqu’à l’arrêt car jaune, lui demandant de cesser ses protestations car il me prenait à témoin : « Qu’est ce que je leur ai fait, je suis pas un délinquant, j’ai acheté ce tee shirt à Maurice, je savais pas »."

"Le comportement de la gendarmerie à l’égard de ce jeune kréol pour une si peu de chose m’a scandalisé ! Un simple rappel à la loi, si nécessaire, ne suffisait il pas ? S’ils avaient eu affaire à un velléitaire, l’affaire aurait pu mal tourner et pourquoi ? Pour rien !"


"Moi simple citoyen respectueux de l’ordre et de ses représentants j’ai eu honte de notre gendarmerie ! Et je me suis dit que de tels comportements, répétés, pouvaient expliquer en partie les relations souvent difficiles entre jeunes et force de l’ordre !"

Alain Aubineau

[Source:LeQuotidien]

Rugby et cannabis: «La grande hypocrisie»

Daniel Vaillant, ancien ministre de l'Intérieur a relancé le débat sur la dépénalisation du cannabis. Il a baptisé son rapport, fruit du travail d'une dizaine de parlementaires : «Sortir de l'hypocrisie». Sortir de l’hypocrisie, c’est aussi ce que le rugby devrait faire plutôt que de sanctionner très lourdement des joueurs, pros ou amateurs, pour quelques bouffées d’un joint. C'est en tous les cas ce qu'estime Mêlée ouverte, pour qui lutter contre les fumeurs n'a rien à voir avec la lutte contre le dopage.

[Source:OuestFrance]

Deux jumelles néo-nazies «sauvées» par la marijuana

Lamb et Lynx Gaede, les deux jumelles du groupe pop néo-nazi américain Prussian Blue, ont bien changé depuis leurs débuts, relate The Daily. Elles avaient connu une couverture médiatique importante à la création du groupe, en 2003 et dans les années qui suivirent. Aujourd'hui, «ma sœur et moi sommes plutôt ouvertes d'esprit», commente Lamb. Même vision des choses pour Lynx:

«Personnellement, j'adore la diversité. Ça me fait chaud au cœur de savoir que nous avons tant de cultures. Je pense que c'est vraiment incroyable, et ça me rend chaque jour fière de l'humanité, que nous ayons tant de lieux et de gens.»

Ce changement, des «Sieg Heil» sur scène à l'ouverture d'esprit dont elles font preuve aujourd'hui, est dû à plusieurs choses. Comme l'explique Lynx, «ma sœur et moi avons été éduquées à la maison. Nous étions ces plouques de la campagne, et nous passions la plus grande partie de nos journées à jouer dans les collines avec des boucs». Jusque récemment, elles n'avaient aucune idée de la portée des paroles qu'elles chantaient.

Leur déménagement dans le Montana, un Etat à dominance blanche, mais «qui diffuse une aura décidément hippie» selon The Daily, a sans doute contribué à leur remise en question, particulièrement visible lors de leur tournée en Europe en 2006. Elles chantèrent à chaque concert de la tournée une reprise de Knockin' on Heaven's Door, de Bob Dylan, un choix particulier, surtout à côté «du répertoire de reprises du groupe Skrewdriver, des chansons folkloriques racistes à la gloire de Rudolph Hess et d'autres “héros” aryens».

Enfin, Lynx a eu un cancer, et développé un syndrome dit de «vomissement cyclique», qu'elle n'a pu guérir que grâce à la prise médicale de marijuana. Lamb a aussi lutté, puisqu'elle a souffert de scoliose et de douleurs chroniques, ainsi que d'un manque d'appétit probablement dû au stress émotionnel. Lynx est devenue l'une des premières mineures à bénéficier d'une carte médicale lui permettant d'obtenir de la marijuana dans le Montana. «Je dois dire que la marijuana m'a sauvé la vie», a déclaré Lynx au Daily. «Je serais probablement morte si je n'en avais pas bénéficié.» Lamb possède aussi une carte, relate le journal.

Seule leur mère, April, qui a joué un rôle important dans leur médiatisation à outrance, doute de leurs positions actuelles. Elle suspecte que leur nouvelle idéologie ne soit qu'un passage.

«Elles ont 19 ans, je pense que quand elles auront des enfants, elles en arriveront aux mêmes conclusions que moi.»

Erin Gloria Ryan, sur Jezebel, commente l'histoire des jumelles en plaisantant:

«[Les filles] aiment maintenant peindre des choses que les fumeurs de marijuana aiment peindre (des images à thématique astrologique, mais bientôt ce sera sûrement les ours dansants des Grateful Dead, ou des lignes qui tourbillonnent, tourbillonnent, tourbillonnent). Elles iront bientôt à l'université, où leurs cartes pour de la marijuana médicinale et leur nature affable leur attireront sans nul doute de nombreux amis.»

Photo: PrussianBlue, Stefano - Stark via Flickr, CC-Licence-by
[Source:Slate.fr]

Environ 100.000 personnes "vivotent" en France grâce au trafic de cannabis















BOBIGNY — Quelque 100.000 personnes, des rabatteurs ou petits dealers, vivent en France grâce au trafic de cannabis, une "économie de survie" ou de la "débrouille", loin des gros revenus des caïds de la drogue, estiment policiers, chercheurs et élus.

Il y a 1,2 million de fumeurs réguliers de cannabis en France, selon l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies. Et le chiffre d'affaires du trafic est estimé entre 700 millions et un milliard d'euros.

Un "secteur économique" hiérarchisé, qui compte au bas de l'échelle quelque 100.000 personnes, des petits dealers, selon Christian Ben Lakhdar, économiste des drogues à l'Université catholique de Lille. Ils gagneraient entre 4.500 et 10.000 euros par an.

A leur côté, le guetteur, souvent un adolescent, est payé en moyenne 100 euros par jour, et la nourrice, un habitant du quartier où a lieu le deal, touche quelques centaines d'euros par mois pour stocker.

Ils sont loin des grossistes et des premiers intermédiaires, quelques centaines ou milliers de personnes, dont le chiffre d'affaire est estimé à plusieurs dizaines voire centaines de milliers d'euros par an.

"En bas de l'échelle, beaucoup vivotent, se font un peu d'argent, c'est l'économie de la débrouille", dit Christian Ben Lakhdar. "Le taux de chômage dans les quartiers est très élevé, il faut bien manger" et "l'argent de la drogue vient en complément du chômage, du RSA, des petits boulots", poursuit l'économiste.

Ces petits trafiquants souvent âgés de moins de 25 ans ont pour la plupart grandi dans les quartiers populaires, sont en décrochage scolaire ou au chômage. Mais ce sont aussi parfois des actifs qui arrondissent leur petit salaire.

Le trafic "rapporte à ceux qui en vivent directement, les trafiquants en premier lieu, et à une partie de leurs proches pour faire les courses", selon une source policière.

"La majorité gagne peu, l'équivalent d'un Smic, ce qui est énorme quand les parents sont au chômage, ça permet d'accéder à la consommation, de faire vivre des familles", explique-t-on au parquet de Bobigny (Seine-Saint-Denis).

"C'est l'économie de la survie", poursuit cette source, qui raconte que lors des perquisitions, "il n'y a rien à saisir, (...) il y a très peu de signes de richesse, peut-être un écran plat, mais c'est tout".

"Dans les commerces (de Sevran), beaucoup de clients paient en liquide, et pas mal de cet argent vient du trafic", affirme Stéphane Gatignon, maire (EELV) de cette ville de Seine-Saint-Denis, un des principaux lieux du trafic de cannabis en France. Il milite pour une dépénalisation.

Une source policière de Seine-Saint-Denis se dit persuadée que "le trafic de cannabis, souvent mêlé à d'autres trafics comme la cocaïne, soutient l'économie des quartiers", où le chômage des jeunes peut atteindre 40%.

Dans ce département, il y a du deal dans 42 cités, selon cette source policière. Si plus de 1.000 personnes ont été interpellées pour trafic de stupéfiants en 2010, il y aurait une quarantaine de gros trafiquants, qui tiennent des halls, dont le chiffre d'affaires peut atteindre 15.000 euros par jour.

Pour Etienne Apaire, président de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt), les petits dealers sont les "manoeuvres de la drogue": "Tous les risques sont répartis sur les jeunes dans la rue ou dans les cages d'escalier".

"Ils pensent qu'ils vont passer au stade du dessus, mais il y a une sélection impitoyable".

Pour le magistrat, l'enjeu est de "convaincre que la formation est plus payante", qu'"il est plus sûr d'avoir 1.000 euros avec un petit emploi plutôt que 600 euros sur une semaine, puis plus rien, puis prison".

[Source:AFP]

Un Ecran de Fumée - Les enjeux de la dépénalisation du cannabis


Un film sur les enjeux de la dépénalisation du cannabis écrit et réalisé par Olivier Coustillon. Et si on légalisait la ganja ? Tour d'horizon sur la question. Différents acteurs du débat interviennent : militants, avocat, homme politique, policier, médecin...

> Le Blog du realisateur : http://olivier.coustillon.over-blog.com

La plus grande plantation de l'histoire !

Les militaires mexicains ont découvert jeudi, une plantation de marijuana de 120 hectares, située non loin de la frontière avec la Californie. Un record pour le pays.


«Il s'agit de la plus grande plantation dans l'histoire du Mexique», a assuré le général Alfonso Duarte, commandant de la Seconde zone militaire, basée à Tijuana (Basse Californie). Selon le militaire, la récolte saisie aurait permis la production de 120 tonnes de marijuana, pour une valeur de près de 160 millions de dollars (plus de 113 millions d'euros).

La plantation, situé dans une zone de culture de la tomate du sud de l'État de Basse Californie, abritait un campement pour les quelque 60 employés. On ignore encore à quel groupe de narcotrafiquants appartenait cette plantation, a indiqué le général, précisant que la précédente découverte la plus importante date des années 1980 et concernait une plantation de 104 hectares dans un ranch de l'État du Chihuahua (nord).

[Source:L'essentiel]

Pays -Bas Fumette en cercle fermé


Machteld Ligtvoet, qui dirige la communication de l’Office du tourisme à Amsterdam, dit n’avoir jamais touché un pétard de sa vie et trouve «pas cool» d’en fumer. Mais pour elle, le projet gouvernemental d’interdire les étrangers dans les coffee-shop sonne comme une insulte à l’esprit tolérant de sa ville : «C’est une idée épouvantable, une solution à des problèmes que nous n’avons pas. Si on les ferme aux étrangers, la demande sera toujours là. Il y aura de nouveau des dealers dans la rue. On reviendra trente ans en arrière. On n’en veut pas.» Le maire Eberhard van der Laan (gauche) a exprimé ses «sérieux doutes» sur un projet «contre-productif», supposant une préférence nationale. Dirk Korf, professeur de criminologie à l’université, imagine la réciproque : «Je viens à Paris et je n’ai pas le droit de boire un verre de vin parce que je suis étranger ?»


5 grammes par personne et par jour


Aux Pays-Bas, la vente de cannabis, bien que formellementillicite, ne donne plus lieu à des poursuites pénales depuis 1976 si elle s’effectue dans un coffee-shop agréé par les autorités qui respecte certaines conditions : pas de publicité, pas de drogues dures, pas de nuisance pour le voisinage, pas de vente aux mineurs, 5 grammes maximum par personne et par jour, stock du magasin inférieur à 500 grammes. N’importe quelle personne majeure peut donc entrer dans ces bars sans alcool pour acheter au comptoir sa «White Widow» à 9 euros le gramme, la consommer sur place ou l’emporter. Sauf que les étrangers, grands amateurs de ces lieux uniques, en seront peut-être bientôt exclus.

Le 27 mai, la coalition des libéraux-démocrates chrétiens, au pouvoir depuis octobre 2010 avec le soutien de l’extrême droite, a présenté un projet qui transformerait les coffee-shop en «clubs privés pour le marché local», via un système d’adhésion. Ils seraient réservés aux Néerlandais. Les membres, dont le nombre ne pourrait pas dépasser 1500, seraient obligatoirement résidents de la ville concernée, ce qui rejetterait de nombreux clients, hollandais ou pas, dans la rue. Le gouvernement espère ainsi que les touristes «ne viendront plus aux Pays-Bas pour acheter et consommer du cannabis». Et ajoute : «Ils peuvent utiliser le marché illégal qui existe chez eux.»

Les Pays-Bas ont compté jusqu’à 1500 coffee-shop. Il en reste 660. Les communes peuvent les interdire : 80% environ n’en ont pas. Mais pour le gouvernement, il faut «en finir avec la politique de la porte ouverte» qui a fait des Pays-Bas un îlot de tolérance attirant les consommateurs européens.

Pour l’instant, les clients, majoritairement étrangers, de l’Easy Going, un coffee-shop de Maastricht, s’en fichent comme de leur premier pétard. L’endroit est discret et calme. C’est pourtant là que tout a débuté. En 2006, la municipalité décrète l’interdiction des coffee-shop aux étrangers, et ferme pendant trois mois l’Easy Going. Fermeture illégale, a estimé, le 29 juin, le Conseil d’Etat : cette décision ne peut pas être prise au niveau local. En revanche, si le gouvernement veut, à l’échelle nationale, interdire ses cannabistrots aux non-résidents, il peut le faire. La Cour de justice européenne a aussi donné son feu vert, le 16 décembre, à cette discrimination : si l’interdiction «constitue une restriction à la libre prestation des services consacrée par le traité instituant la Communauté économique européenne», elle est «justifiée par l’objectif visant la lutte contre le tourisme de la drogue et les nuisances qu’il draine».

Rabatteurs agressifs

A Maastricht (120 000 habitants), la municipalité est désormais divisée sur l’attitude à adopter. Chaque année, 2,1 millions de clientsviennent dans ses coffee-shop, selon une étude de leurs patrons en 2008. Et 70% des clients sont étrangers. Les retombées économiques pour la ville, hors achat de shit, sont estimées entre 100 et 140 millions d’euros par an. «Maastricht a toujours dit qu’il ne faut pas fermer les coffee-shop,explique Robert Bongers, conseiller du maire pour les drogues. Car si on ferme, la demande sera toujours là.» Et elle se dirigera vers les dealers de rue. En attendant que le gouvernement tranche, la municipalité s’est prononcée pour le déplacement, d’ici à 2013, de la moitié de ses quatorze coffee-shop vers l’extérieur de la ville. Objectif : limiter les nuisances (voitures mal garées, incivilités, etc.) en centre-ville et éloigner les «drug runners», ces rabatteurs agressifs qui attirent les «touristes de la drogue» vers le marché illégal, hors coffee-shop, où circulent des drogues plus dures (héroïne, cocaïne).

Selon Maria Essers, qui anime une association antidealers, «si le gouvernement introduit le système des cartes de membre, ces drug runners vont récupérer les clients laissés à la porte, et il y aura davantage de problèmes.» «Avant 1996, il y avait des coffee-shop partout, ajoute Manon Fokke, conseillère municipale (gauche). Puis, beaucoup ont fermé. Et maintenant, on a plus de problèmes avec les dealers.»

Ce souci n’existe que dans certaines villes frontalières du sud, proches de la Belgique, de l’Allemagne et de la France. Ironie de la situation : ce sont les politiques prohibitionnistes des autres pays européens qui torpillent le système hollandais. Le gouvernement s’en sert comme prétexte. «Toutes les idées pour réduire les coffee-shop sont bonnes», dit Coşkun Çörüz, porte-parole des chrétiens-démocrates (minoritaires dans la coalition), qui pousse pour la «tolérance zéro» : «Le but de notre parti, ça a toujours été d’expulser le cannabis de notre société, car il est mauvais pour la santé et l’équilibre mental, surtout des jeunes.» En fait, jusqu’en 1996, les chrétiens-démocrates soutenaient ce système qui a fait ses preuves, notamment en matière de santé publique. Et, malgré la disponibilité du cannabis, on en fume bien moins qu’en France…

Pour le chercheur Martin Jelsma (1), «le parti chrétien-démocrate n’a pas décidé formellement de fermer les coffee-shop. Il tente simplement d’imposer des règles plus strictes, qui rendront l’existence du système de plus en plus compliqué. Mais il va être confronté à une résistance des municipalités.» Dans ce pays décentralisé, la lutte entre pouvoir central, désireux d’imposer ses choix, et pouvoirs locaux, qui tiennent à leur autonomie, reste indécise. Cet automne, il y aura des auditions au Parlement, puis un débat sur le projet de «clubs» interdits aux étrangers. S’il passe, les restrictions entreraient en vigueur au plus tôt en 2012. D’abord, peut-être, dans le sud. Amsterdam négocie en coulisse pour y échapper. «On espère que le maire va réussir à régler ça en douceur. Sinon, il pourrait y avoir du grabuge», dit Machteld Ligtvoet. Car l’enjeu est d’importance. «Quatre millions de personnes visitent Amsterdam chaque année. Un million vont dans un coffee-shop», explique Iris Reshef, porte-parole de la municipalité. Leur fermer la porte ? «Ils viendront toujours et ils achèteront le cannabis dans la rue, prédit Iris Reshef. Cela provoquera du deal, de l’insécurité, des nuisances.»

La ville s’irrite grandement d’une autre mesure envisagée par le gouvernement : augmenter la distance minimale entre un coffee-shop et une école. Elle est actuellement de 250 mètres (et déjà peu respectée à Amsterdam). Elle passerait à 350 mètres. A Amsterdam, 116 des 223 coffee-shop devraient fermer. Si on inclut les écoles primaires, il n’en resterait que 36. Résultat : «Cela va augmenter le marché illégal dans la rue.»

Pour les partisans des coffee-shop, comme Mario Lap, de la Fondation Drugtext, la seule question à régler, ce serait plutôt celle de la «porte de derrière», c’est-à-dire de l’approvisionnement des coffee-shop, qui reste illégal. Au Easy Going, Marc Josemans, qui emploie trente-neuf personnes, est comme un boulanger qui n’aurait pas le droit d’acheter de la farine. «J’ai une licence légale pour vendre un produit que j’achète illégalement. Ça vient d’où ? Pas du ciel. J’ai un réseau. Je suis obligé de faire du business avec des gens illégaux.» Près de 85% de ce qu’il vend est cultivé aux Pays-Bas. Une production aux mains du milieu, autre raison du courroux gouvernemental : «Avant, les planteurs étaient des babas qui portaient des chaussettes dans leurs sandales et parlaient à leurs plantes, explique Josemans, depuis vingt-huit ans dans le business. Mais beaucoup ont arrêté car la police les a harcelés. Ils n’ont pas envie d’être considérés comme des criminels.»

Légaliser la production

Pour mettre fin à l’hypocrisie, le Parlement a voté par deux fois la légalisation de la production, en 2000 et 2005. Mais le gouvernement n’a jamais osé l’appliquer, sous la pression de pays étrangers comme la France, ou de peur de se mettre en porte-à-faux avec les conventions internationales. «Mais qu’est-ce qui se passerait ? Les casques bleus ne viendraient pas envahir le pays !», dit Tom Blickman, de TNI (2).

En 2008, les maires des trente principales villes se sont prononcés pour une expérimentation : autoriser des planteurs à produire sous licence, et voir si la filière illégale, aux mains du milieu, reculait. Mais le projet est resté lettre morte. Au printemps, Utrecht, quatrième ville du pays avec 300 000 habitants, a décidé de lancer une autre expérience en créant un club sur le modèle des «cannabis social clubs» espagnols. «Les membres feraient pousser eux-mêmes leur marijuana», explique l’adjoint au maire Victor Everhardt. Chaque résident néerlandais ayantactuellement le droit de faire pousser cinq plants, un club de cinquante membres pourrait en cultiver 250. «Ça permettrait de contrôler le niveau de THC [un des deux principes actifs du cannabis, ndlr], d’empêcher l’usage des pesticides, de cultiver bio», dit Everhardt.

Le gouvernement a immédiatement affirmé que ce serait illégal. Mais son projet de cartes de membre s’annonce aussi difficile à mettre en place. Ce fichage sera-t-il légal ? Comment sera-t-il contrôlé ? Les consommateurs n’ont pas envie de s’y plier. Selon une étude du criminologue Dirk Korf sur 1 200 usagers à Amsterdam, 83% étaient contre. S’il était institué, seuls 32% y adhéreraient. «L’étiquette de consommateur de cannabis les effraye, ils veulent rester dans la discrétion», affirme Korf.

Autre écueil : peut-on être adhérent d’un club qui s’adonne à une activité illégale ? «Les membres seront officiellement autorisés à enfreindre la loi, qui interdit toujours la détention de cannabis, constate Derrick Bergman, de VOC, groupe prolégalisation. Ce système ne passera pas. Il y aura trop d’opposition.» Mais sinon, «ce sera la fin des coffee-shop tels que nous les connaissons». Et la ministre de la Santé, Edith Schippers (libérale), a déjà ouvert un nouveau front fin juin : le cannabis dont le taux de THC dépasse 15% pourrait être considéré comme une drogue dure, et donc interdit à la vente en coffee-shop.

(1) TNI (Transnational Institute) à Amsterdam. (2) Voir son blog http://www. undrugcontrol.info/en/weblog/

[Source:Liberation]