Une solution humanitaire pour sauver Rappaz?

GRÈVE DE LA FAIM | Bernard Rappaz est dans un état «alarmant». Face aux blocages, des voix réclament un sursaut de conscience

© ISABELLE FAVRE | Bernard Rappaz, en 2002, dans ses cultures en Valais. Son état de santé est jugé «alarmant», au 76e jour de sa grève de la faim.
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Patrick Chuard | 09.11.2010 | 00:00

La mort de Bernard Rappaz paraît programmée, face aux refus de toutes parts de débloquer la situation. A commencer par le refus des autorités valaisannes d’accorder une remise de peine au chanvrier. Le refus, ensuite, des médecins des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) de nourrir le détenu de force – et ce malgré l’injonction envoyée vendredi par le juge cantonal valaisan Jean-Bernard Fournier. Le refus, enfin, de Bernard Rappaz d’interrompre sa grève de la faim de «prisonnier politique», s’estimant injustement condamné à plus de six ans de réclusion, principalement pour trafic de chanvre. Son état de santé est jugé «alarmant», au 76e jour de sa grève de la faim.

«Dépasser l’irritation»
Faut-il laisser mourir Rappaz? «C’est impensable! lance le médecin genevois et conseiller national Jean-Charles Rielle. Nous devons dépasser l’irritation et la pensée basique. En 2010, notre société ne devrait pas laisser quelqu’un crever en prison!» Le socialiste jure qu’il n’en fait ni un combat politique ni un appel pour la dépénalisation des drogues: son souci est humanitaire. «Un homme est en train de mourir parce qu’il est désespéré. Il a une petite fille de 12 ans. Or, des gens qui ont commis des crimes graves écopent de peines de prison bien moins lourdes que Bernard Rappaz. On pourrait par exemple imaginer qu’il purge sa peine avec un bracelet.» Laisser mourir le chanvrier serait «une catastrophe pour tout le monde», plaide de son côté Anne-Catherine Menétrey (Verts/VD).
Dimanche à la RSR, le sociologue Bernard Crettaz y est aussi allé de son appel: «Il faut lancer un cri à tout le monde pour sauver Rappaz, il faut éviter une sorte de Ponce-Pilatisme généralisé. On serait dans un cas terrible d’hypocrisie sociale.»

Mais comment ébranler des murs de détermination? La conseillère d’Etat valaisanne Esther Waeber-Kalbermatten n’entend pas céder, pas plus que la justice et le corps médical (relativement unanime à refuser l’alimentation forcée). «Une solution existe pourtant», affirme Jean-Charles Rielle. Et de citer le cas de Manuella Crettaz, détenue vaudoise dont la peine a été interrompue pour six mois en mai dernier, suite à une longue grève de la faim. Cette décision a été prise par le juge d’application des peines sur conseil médical, pour cause de «motif grave» (art. 92 du Code pénal), confirme le Service pénitentiaire vaudois.

Philippe Roch s’engage
Le Genevois Philippe Roch, ancien directeur de l’Office fédéral de l’environnement, joint sa voix au concert des indignés. «J’ai écrit un mail aux députés valaisans qui statueront dans dix jours sur la demande de grâce de Rappaz, dit-il. Je leur ai demandé un acte de pardon, au nom de l’humanité. Parce que
Rappaz n’est pas capable de changer d’avis en ce moment. Il est dans la détresse et il a un profond sentiment d’indignation.» Vendredi, la Ligue suisse des droits de l’homme (LSDH) demandait elle aussi aux autorités valaisannes de cesser de «s’acharner» sur le chanvrier et d’accéder à sa requête «légitime» d’interruption de peine. Ces appels humanitaires seront-ils entendus?

[Source:Tribunedegenevre]

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