Paris, le mercredi 13 juin 2012 – Une polémique chasse l’autre et de nombreux esprits, même bien avertis, ont peut-être oublié que la semaine dernière le débat politique du moment portait sur un sujet finalement sans doute moins fumeux que le gazouillis conjugal qui occupe aujourd'hui tous les médias : la dépénalisation du cannabis. C’est le ministre du logement, Cécile Dufflot, qui avait jeté un pavé dans la marre en prenant à contre-pied la ligne officielle du gouvernement lorsqu’elle rappela que, pour sa part, en tant que présidente du parti écologiste EELV, elle demeurait favorable à la dépénalisation de la consommation de ce produit stupéfiant. Si l’on a beaucoup entendu les détracteurs de Cécile Dufflot, certains se sont cependant pressés de soutenir cette position, tel le président du parti radical de gauche (PRG), Jean-Michel Baylet. Interrogé sur les ondes de RTL la semaine dernière, le leader politique a ainsi rappelé une nouvelle fois qu’il soutenait l’idée d’une dépénalisation du cannabis. Mais le président du PRG est même allé plus loin en suggérant que le produit soit vendu en « pharmacie ». A ses yeux, une telle solution permettrait d’assurer un contrôle du produit, afin que soit « délivré » aux consommateurs un THC de bonne qualité et dosé « de façon un peu moins forte ». L’économie souterraine, les troubles à l’ordre public engendrés par les trafics et les problèmes de santé publique s’en trouveraient du même coup résolus a insisté Jean-Michel Baylet.
Si c’est un médicament, comment refuser ?
Bien sûr, la proposition n’a pas laissé indifférent les premiers intéressés : à savoir les pharmaciens. Première constatation : vendre du cannabis sous sa forme actuelle, n’est absolument pas envisageable pour les officinaux. La donne serait cependant différente si le produit obtenait le statut de médicament et s’il était dûment prescrit à des fins thérapeutiques. « Nous délivrons déjà, sur ordonnance, des substituts de synthèse à l’héroïne. Nous distribuons par ailleurs, gratuitement des seringues aux toxicomanes pour leur éviter de se contaminer par des virus » rappelle cité par le Figaro, le président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), Philippe Gaertner. Dans de telles conditions, selon lui, les pharmaciens ne pourraient pas refuser de délivrer du cannabis. Certes, mais une telle présentation ne correspond peut-être pas exactement à la proposition de Jean-Michel Baylet, qui semble vouloir faire des officines des « guichets » pour une délivrance sécurisée du cannabis, au-delà de la question éventuelle de ses vertus thérapeutiques.
Des vertus thérapeutiques pas exclusives
Des vertus thérapeutiques qui demeurent d’ailleurs sujettes à caution. Toujours dans les colonnes du Figaro, le professeur Jean Costentin, pharmacologue spécialiste des addictions et membre de l’Académie de pharmacie, remarque que « certes le cannabis a des effets antalgiques, relaxant, antivomitifs. Mais pour chacun de ces effets, la médecine dispose déjà de produits bien plus efficaces ! » assure-t-il, tandis que même sous une forme synthétisée le THC conserve de nombreux effets secondaires.
Aurélie Haroche
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