Le 25 octobre 2011 la Commission Européenne publiait " Vers une réponse européenne plus forte envers les drogues", une "Communication de la Commission du Parlement et du Conseil Européens".
La communication de la CE peut être résumée comme suit : "Nous avons besoin d’encore plus de la même chose, et il n’’est pas nécessaire de donner des explications."
Je pense que nous devons protester pour différentes raisons.
La CE annonce simplement avoir décidé que la "réponse aux drogues" doit être plus forte et mieux coordonnée dans les pays de l’UE mais ce texte n’explique pas pourquoi la réponse européenne devrait être plus forte et non pas différente.
Le plus marquant de cette "communication" c’est que, malgré qu’elle contienne des documents de l’OEDT, il n’est pas fait référence au Rapport Reuters/Trautmann intitulé "Rapport sur les Marchés des Drogues Illicites 1998-2007". Ce rapport détaillé, commandé par la CE et payé par les citoyens européens, a conclu (selon mon résumé) que les efforts internationaux pour lutter contre les drogues ont généré beaucoup de dégâts, sans qu’il n’y ait aucun résultat positif en contre-partie.
Comme beaucoup d’autres personnes addictes, la CE se met en position de rejet de la réalité, comme si aucune personne sensée n’argumentait pour une régulation légale, et comme s’il n’y avait aucune raison de considérer des alternatives.
Les auteurs de la communication ont réalisé un travail simpliste en analysant ainsi la situation actuelle. Comme conséquence de leur dépendance désespérée à la prohibition, tout ce qu’ils ont produit c’est un nouvel exemple de politique déconnectée de la réalité.
Ces dernières années un nombre croissant d’anciens chefs d’état et de haut-fonctionnaires se sont exprimés publiquement, disant que la guerre aux drogues devait être remplacée par une régulation légale. Le même discours a été tenu à l’intérieur même de la Commission. Je ne vois aucune raison de taire le fait que Carel Edwards, prédécesseur de Mme Dana Spinant (Chef de l’Unité de Coordination en matière de Drogues de la Commission Européenne) a adhéré à une des plus importantes organisations qui plaident pour la fin de la prohibition., Law Enforcement Against Prohibition. LEAP est une organisation qui a vu le jour aux Etats-Unis et qui est formée par des policiers et des fonctionnaires (anciens et actuels) du Ministère de la Justice.
Cette communication n’est pas une initiative de personnel de la CE. Ils savent qu’il n’y a aucun argument convaincant pour justifier l’intensification de la guerre aux drogues. Cela ne peut qu’être une initiative du Commissaire Responsable Cecilia Malmström, ] et/ou de la Commission Européenne dans son ensemble.
Une des raisons tient peut-être au changement de responsabilité dans la rédaction de la nouvelle stratégie des drogues. Cette stratégie, pour la période suivante ne sera pas écrite par la CE mais par le Conseil qui sera présidé par le Danemark lors du premier semestre de l’année prochaine et par Chypre à partir du 1er Juillet.
De même, la Commissaire est, ou devrait être, consciente qu’il sera de plus en plus difficile d’éviter un débat ouvert sur les politiques alternatives à la prohibition. Si la CE ne donne pas maintenant son opinion, elle n’aura qu’une possibilité de le faire plus tard dans le processus mais elle veut le diriger comme elle a l’habitude de le faire.
Dans son intention d’informer le Parlement Européen et le Conseil, la Commission aurait dû dire ceci :
Nous sommes désolés mais notre devoir est de vous mettre en face de la sévère diminution de crédibilité de l’actuelle politique des drogues. La preuve la plus récente, en espérant que vous l’avez remarqué, a été le rapport publié par la Commission Mondiale sur la Politique des Drogues en juin 2011. En novembre 2011 les conclusions de ce rapport ont été soussignées par de nouvelles personnes dont beaucoup ont une expérience de responsabilité dans les politiques des drogues. Le rapport présente une liste courte mais pertinente de références qui prouvent clairement le manque de résultat de la politique des drogues de l’ONU qui est la base de la politique des drogues de l’UE.
Nous devons vous informer que la demande pour un débat et pour une révision des politiques prohibitionnistes se fait de plus en plus forte et qu’elle se base sur de meilleures preuves que celle de la prolongation de ces politiques. Le Forum de la Société Civile sur les Drogues de la Commission Européenne ne peut pas s’accorder sur ce point. Il sera divisé, comme il l’est dans le monde réel.
Des mots semblables ont probablement été prononcés dans des réunions et contacts privés.
La "communication" de la CE est une sorte d’attaque préventive pour essayer de forcer le Conseil Européen à s’accorder rapidement et sans réfléchir avec une stratégie plus intensive. Dans la communication la CE a annoncé un questionnaire public qui est déjà opérationnel sur son site web. Il contient surtout des questions administratives mais il laisse un espace aux commentaires. Il semblerait que la CE veut que le Conseil prenne une décision avant de publier les résultats du questionnaire et de la consultation en continu de la société civile.
Il est bien connu, à Bruxelles et ailleurs, que la demande pour une politique des drogues différente se fait croissante, et plus spécialement chez les gens qui en savent plus sur ce thème que la majorité, et qu’il sera difficile d’éviter ce débat à l’intérieur de la CE. Le projet de "réponse plus forte" causera encore plus de dégâts "non intentionnés" et il ne sera pas facile de les réparer.
ENCOD projette de protester contre le plan de la CE, avec des organisations sympathisantes et avec l’aide de membres du Parlement Européen.
Nous espérons toujours réussir à organiser le débat plus que nécessaire sur des politiques des drogues alternatives dans l’Union Européenne.
Par Frederik Polak
Source:ENCOD
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