Jean-Michel Baylet a fait (entre autres) parler de lui lors de la récente campagne des primaires citoyennes en se prononçant pour la légalisation du cannabis. Il faut dire que dans sa région et en particulier à Toulouse une telle mesure concernerait pas mal de monde. La ville est en effet réputée pour être un terreau fertile de plantations. Nous sommes allés rencontrer ces cultivateurs dont certains font pousser de façon bio jusqu’en Ariège.
« Au fond c’est un peu comme quelqu’un qui prend plaisir à tailler ses roses.»
Dans son appartement cosy situé au cœur du quartier des Carmes, presque rien ne laisse supposer que Marc cultive du cannabis. Seuls quelques câbles sortant d’un mur peuvent attirer l’œil averti. Pourtant il suffit de pousser la porte de sa penderie pour découvrir sa plantation. Une activité plutôt répandue puisqu’en France plus de 47% de l’herbe fumée est produite dans l’hexagone (selon une étude de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies en 2005). Marc, étudiant en Master, a acheté sa chambre de culture il y a trois ans. «C’est un investissement, il faut compter près de 150€ pour l’installation. Il reste ensuite à acheter l’engrais , le terreau et les différents produits. Pour les graines ce n’est pas compliqué tu peux les commander sur internet, elles viennent d’Espagne.»
Si l’économie réalisée à terme est intéressante, c’est surtout l’envie de tranquillité qui l’a poussé à se lancer. «J’ai commencé à fumer régulièrement à 15 ans. A 18 ans et quatre jours j’ai fait ma première garde à vue. A la longue j’en ai eu assez de tout ça. Maintenant plus de problèmes avec les flics. C’est pour toi et ça reste chez toi. Je suis beaucoup plus serein depuis.» En 2008 à peine plus de 2100 plantations ont été découvertes par les forces de l’ordre (selon la même étude de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies). Même si certaines affaires, comme ces350 plants découverts à Castres en 2009 (La Dépêche du Midi du 1er avril 2009), défrayent la chronique, le nombre d’interpellations demeure marginal au regard du million de pieds nécessaires à la consommation française.
« J’ai commencé à fumer régulièrement à 15 ans. A 18 ans et quatre jours j’ai fait ma première garde à vue. A la longue j’en ai eu assez de tout ça. Maintenant plus de problèmes avec les flics »
Marc fait deux à trois récoltes par an. « Je pourrais en faire plus mais c’est aussi beaucoup de contraintes. Comme je pars pour Noël, je n’ai pas encore lancé de nouvelle culture. Ça te prend du temps. Il faut préparer tes produits, arroser, tailler. Tout ça, c’est du jardinage. C’est plutôt agréable. Au fond c’est un peu comme quelqu’un qui prend plaisir à tailler ses roses.»
En trois ans, Marc est devenu un jardinier averti. «Tu fais des recherches, tu t’intéresses au fonctionnement des plantes. Au début tu es novice, donc tu vas dans les growshops pour te renseigner.»
Annuaire spécialisé et culture de cannabis bio en Ariège
Un annuaire spécialisé recense 11 boutiques dans la région Midi-Pyrénées, une liste loin d’être exhaustive. Selon des spécialistes de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, cités par La Dépêche du Midi, Toulouse aurait même été précurseur en matière de culture en intérieur. « Cela fait plus de 20 ans que des gens produisent ainsi dans la ville rose. »Adrien est vendeur dans l’une de ces jardineries spécialisées. Une boutique qui a pignon sur rue dans une artère commerçante de Toulouse. Sans surprise, il se montre réticent à l’idée d’évoquer le sujet. Il accepte à la condition que le nom de sa boutique n’apparaisse pas. « On préfère ne pas faire trop de publicité. Même avec les clients on évoque pas trop le sujet. On sait pourquoi ils sont là, mais ça reste en quelque sorte tabou. L’objectif c’est que ceux qui le font puissent continuer tranquillement. » Les vendeurs d’équipement souhaitent surtout protéger un commerce florissant. Selon lemonde.fr, il y aurait plus de 200 boutiques consacrées « aux cultures d’intérieur en France ». Contre toute attente, le commerçant est contre la légalisation du cannabis. « D’abord ce ne serait pas très bon pour le business! Surtout, je pense que les Français ont un comportement excessif. On est déjà les plus gros consommateurs d’Europe. Et puis il suffit de regarder la Hollande où le commerce est légalisé, on voit là-bas fleurir toutes sortes d’autres drogues. »
Julie cultive également son cannabis. « Juste pour ma consommation perso et sans matériel, sans engrais, de façon totalement naturelle. On doit seulement arroser régulièrement. » C’est la volonté de consommer un produit plus sain qui a poussé cette Toulousaine et quelques uns de ses amis à se lancer dans l’agriculture. « Depuis deux ans on fait pousser une vingtaine de plants dans un petit coin tranquille en Ariège. Comme c’est en plein air, ils ont la place pour grandir et donc produisent pas mal, environ un kilo cet été. L’herbe est moins forte que celle qu’on peut acheter mais elle est bien meilleure. »
> Tous les prénoms ont été modifiés à la demande des intéressés.
Photo : CC via Flickr par smokershighlife
Source : Carredinfo
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