Le sénateur québécois Pierre Claude Nolin (archives) © PC/JACQUES BOISSINOT
Le sénateur québécois Pierre Claude Nolin fait entendre une voix dissonante et dissidente au sein du camp conservateur. Il s'est prononcé dans la Chambre haute contre le projet de loi C-10 sur la justice criminelle.
Partisan de la décriminalisation de l'usage du cannabis, Pierre Claude Nolin affirme qu'il ne peut appuyer ce texte défendu bec et ongles par le gouvernement de Stephen Harper à cause d'une section portant sur la culture de la marijuana.
Le projet de loi prévoit des peines de prison minimales de six mois pour les personnes cultivant de 6 à 200 pieds de cannabis, la sanction pouvant aller jusqu'à neuf mois d'emprisonnement en cas de circonstances aggravantes, notamment si la production s'effectue à proximité d'enfants. Des détracteurs du texte ont ainsi souligné que les peines proposées étaient plus sévères que certaines peines minimales dans le cadre de crimes à caractère pédophile.
« Les tribunaux et la police possèdent déjà les outils pour faire face aux problèmes majeurs de trafic et aux gangs », a déclaré vendredi Pierre Claude Nolin, lors du débat de deuxième lecture du projet de loi au Sénat. « Ne débutez cependant pas le processus de modifier la Loi sur les stupéfiants, c'est une mauvaise idée. La prohibition est une mauvaise façon, cela ne fonctionne pas, et cela va créer plus de problèmes que quoi que ce soit d'autre », a-t-il également conseillé à ses collègues.
« Je suis malade, je veux atténuer ma douleur, et au lieu de faire pousser la marijuana moi-même, je vais l'acheter de l'ami d'un ami d'un ami. Est-ce ce que nous voulons? Moi, en tous cas, je ne veux pas ça. » — Pierre Claude Nolin
Selon le sénateur, une bonne partie du million de Canadiens qui utilisent la marijuana pour des raisons médicales, et font pousser leurs propres plants, devra nécessairement se tourner vers d'autres sources d'approvisionnement. L'adoption du projet de loi omnibus constituerait ainsi une aubaine pour le crime organisé.
« Le projet de loi C-10 aura exactement l'effet inverse que celui désiré. D'ailleurs, les criminels sont déjà morts de rire en se rendant déposer leur argent, car les amendements à la Loi sur les stupéfiants dans C-10 leur offriront un marché plus important », a signalé Pierre Claude Nolin.
Une seule solution : la décriminalisation
L'ancien du Parti progressiste-conservateur se dit également inquiet de l'impact du projet de loi sur les jeunes contrevenants. Il souligne qu'une majorité des 12-17 ans ont essayé le cannabis, et que certains d'entre eux font pousser des plants sur les campus. Pierre Claude Nolin considère que ce serait une grave erreur d'envoyer ces jeunes gens en prison après leur avoir fait subir un procès dans un tribunal pour adultes.
« Il y a seulement une solution, une solution à long terme. Faites disparaître la prohibition », a suggéré le sénateur sous les applaudissements du Sénat. « Utilisez au moins une solution à court terme, c'est-à-dire de conserver le statu quo, de ne pas amender la Loi sur les stupéfiants. Cette loi n'est pas bonne, mais au moins, elle est là, et nous n'avons pas encore trouvé ce que nous allons faire à long terme, mais n'y touchez pas », a-t-il insisté.
Adopté en troisième lecture lundi soir à la Chambre des Communes, le projet de loi C-10 a été accepté vendredi en deuxième lecture par le Sénat. Il sera à nouveau étudié par les membres d'un comité sénatorial lorsque le Parlement reprendra ses travaux à la fin du mois de janvier.
Depuis son dépôt en Chambre le 20 septembre dernier, le projet de loi omnibus a fait l'objet de vives critiques, notamment en Ontario et au Québec. C'est en revanche la première fois qu'un membre du Parti conservateur s'y oppose ouvertement.
Source:Radiocanada
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